• 24/11/2020
  • Nina Grandjean

Sous les voiles d’un doux souvenir estival

Les Étés sont chauds et ensoleillés (Anna Faury, 2020)

Les étés sont chauds et ensoleillés documente le voyage en voilier d’Anna Faury et de ses amis Adrien, Jean et Martin en mer Méditerranée. La caméra de la réalisatrice capte alors les derniers instants de partage de ce périple, qui se révélera être leur dernier. Sa voix accompagne les images en voix off à certains moments et nous emporte au gré des vagues, le vent souffle dans la voile, Il fait bon vivre sur le bateau. Mais cette douceur de vivre n’est-elle qu’illusoire? Passagère?

Le film vient évoquer, à travers les discussions animées des jeunes passagers, tous dans leur vingtaine, les questionnements liés à leur jeunesse, ou encore aux sujets essentiels à nos vies à tous. On y parle de politique, d’écologie, d’amitié, de partage, mais aussi de doutes, d’angoisses. L’avenir semble flou, incertain. Cependant le désir de profiter de la vie, de ces instants partagés est plus que présent et l’emporte parfois sur le reste.

Une dimension métaphorique se lie au propos de la narratrice. Et si le vent rejoignait le temps qui passe, la vie qui avance? Le trajet suit alors le cours de l’histoire, il permet d’aller de l’avant, d’apprendre, de grandir. L’aspect poétique des images de la nature, des vagues, apporte une forme de douceur au sentiment d’inconnu lié au changement. La tristesse des derniers instants liée à la fin des voyages ensemble, se transforme en une envie de partage, d’échange avec l’autre, tant que c’est encore possible.

Le regard sensible et intime d’Anna Faury se pose sur le temps qui passe, sur la nouvelle étape de vie qui vient s’ouvrir à elle et ses amis en plein mûrissement. Le changement prend la forme d’un nouveau palier, comme si on devait en quelque sorte accepter les normes posées par la société afin de pouvoir y vivre librement, comme on le souhaite. Les conversations de la réalisatrice et de ses trois amis viennent justifier ce propos. Il est parfois compliqué d’être en accord avec tout ce qui nous entoure. L’importance d’apprendre de l’autre et d’accepter les points de vues qui diffèrent est indéniable. Tout le monde peut se reconnaitre à travers le documentaire et l’image de la jeunesse qu’il renvoie. Nous passons tous en grandissant par des questionnements, des sortes de crises existentielles. De nombreux changements viennent croiser nos chemins, c’est ce qu’Anna Faury essaye en partie de partager ici. Un discours compréhensible de tous, mais également très subjectif car il s’agit avant de tout pour elle de profiter de ces deniers instants estivaux avec ses amis avant la fin du voyage.

Malgré le vent qui vient faire avancer le voilier, et l’envie d’aller à l’encontre de celui-ci pour que ces instants ne prennent jamais fin, la vie et les chemins se séparent vers des horizons différents. Toute chose prend fin un jour, la réalité nous rattrape vite, et c’est cela qu’essaye de capter la jeune réalisatrice avec sa caméra, tout en ayant pour vocation de profiter du plaisir de filmer ce à quoi elle tient sincèrement : ses amis, la jeunesse, la vérité des images et les discours qu’elles transmettent, de la manière la plus vraie possible car le documentaire pour Anna Faury est avant tout un moyen de filmer le réel.