Un conte charmeur qui invite à l’évasion
La Grande nuit (Sharon Hakim, 2020)
Inspiré de l’opérette égyptienne El Leila El Kebira, La Grande nuit nous montre une jeunesse remplie d’amour en quête de liberté. Le court-métrage de Sharon Hakim raconte l’histoire d’un étudiant en médecine d’origine syrienne, promis à un brillant avenir, et son attirance pour Esma, jeune danseuse de cabaret d’origine algérienne. Dans cette comédie musicale, l’amour de ces deux jeunes gens est chanté dans les rues de Barbès.
La Grande nuit est avant tout le portrait d’une jeunesse franco-arabe qui s’assume et qui ose tracer son propre chemin. Bien loin des représentations habituelles, la manière dont est filmée l’identité biculturelle des personnages nous apporte une bouffée d’air frais. Cette jeunesse est vivante, festive, moderne, sans pour autant être idéalisée. En effet, on y voit leurs problèmes, leurs doutes, leurs défauts. Le sentiment de liberté qui se dégage de cette communauté permet de s’identifier à eux, et donne envie de les rejoindre dans ce moment incertain de leur existence. La caméra nous emmène avec eux dans les rues du quartier, jusque dans le cabaret, lieu d’évasion où le monde extérieur s’efface derrière l’amitié et la bienveillance. C’est dans ce décor aux allures utopiques, qu’Esma danse et chante.
La réalisatrice parvient à faire de cette opérette en une fable touchante. Musiques et chants se mêlent parfaitement aux dialogues. Les chansons sont modernisées, entraînantes et saisissantes, sans perdre le charme de l’opérette originelle. Les chants, portés par les voix transperçantes des acteurs Tamara Saade et Aghiad Ghanem, donnent des frissons. Ils élèvent le récit avec un talent exceptionnel et parviennent à faire résonner haut et fort l’amour voilé de leurs personnages.
La Grande nuit, en compétition à la 42e édition du festival Cinemed de Montpellier (2020), a fait l’unanimité au sein de notre groupe d’étudiantes en cinéma. En 22 minutes, la réalisatrice parvient à nous impliquer dans une histoire d’amour mélancolique. En réalisant ce premier court métrage, Sharon Hakim affiche d'emblée un style singulier fondé sur une sensibilité picturale communicative. On se réjouit de découvrir la suite.