Sélection des étudiants, sélection des établissements : le sens des réformes et des « expérimentations » en cours
Depuis plusieurs années, l’université Paul-Valéry Montpellier 3 se voit contrainte, faute de moyens suffisants, comme de nombreuses autres universités françaises, de geler ou suspendre des postes de façon chronique (un poste suspendu sur deux cette année encore), et de mettre en oeuvre des capacités d’accueil dans les filières sous tension, cela alors même que le nombre d’étudiants ne cesse d’augmenter.
On conçoit mal comment l’établissement pourrait mettre en place, sans moyens adéquats, un processus d’étude de dossiers qui fasse sens et une remédiation efficace destinée aux étudiants qui en auraient besoin.
Les universités ont à cœur d’accompagner, de former et de favoriser la réussite du plus grand nombre. C’est là tout le sens de leur mission. Mais pour atteindre cet objectif, il faut des moyens. Alors que 6 milliards d’euros partent vers les entreprises en crédit impôt recherche d’un côté, et que de l’autre, le gouvernement continue de dépenser deux fois plus par élève de CPGE que par étudiant.e, l’on demande l’impossible aux universités chroniquement sous-dotées depuis les RCE.
En mettant en place des « attendus » sans accorder de moyens suffisants aux universités et sans réfléchir aux formations en amont de l’université, le ministère s’apprête en réalité à mettre en œuvre une sélection qui ne dit pas son nom. Derrière l’affichage d’une volonté d’amélioration de la réussite des étudiants en licence, sous couvert d’une supposée personnalisation, c’est un changement complet de la politique d’accès des bacheliers à l’enseignement supérieur qui est organisé. C’est un recul, et non un progrès social.
La sélection des étudiants va de pair avec la sélection des établissements qui sont mis en concurrence de façon toujours plus criante au nom d’une prétendue excellence qui aboutit à accentuer les inégalités au lieu de les réduire. À force d’ « expérimentations » tous azimuts, c’est tout le système universitaire public français qui est mis en péril et qui se dissout dans une mise en concurrence des étudiants et des établissements, alors que l’État devrait s’engager à assurer la formation de toutes et tous, et permettre l’accès à la culture, à la science, au débat d’idées sur tout le territoire.
Comment ne pas voir que la réforme en cours vise à faire le tri entre les établissements dits « d’excellence » qui accueilleront les « excellents » étudiants et les « autres » établissements qui accueilleront les « autres » étudiants ? Comment ne pas voir que l’enjeu derrière cette réforme est de continuer à faire émerger quelques sites qui figureront dans le sacrosaint classement de Shanghai, alors que les autres en seront réduits au statut de collèges universitaires ?
Afin de continuer à défendre le service public universitaire français, le CEVU de l’université Paul-Valéry Montpellier 3 refuse de mettre en place la réforme de l’accès à l’université sans un investissement massif dans l’université, dans un contexte où il est de plus en plus vital que chaque jeune puisse avoir accès au savoir et à la formation, sur tout le territoire.
Motion Snesup-FSU
(Unanimité moins 7 abstentions)