Lumière

Une femme muette qui utilise son piano pour s'exprimer, un amour mélangé dans les accords d'instrument qui parlent mieux que les mots. Parmi les films de Jane Campion, il en est un qui se distingue par son histoire pertinente et cinématographie exceptionnelle : La Leçon de piano. En se retranchant dans le mutisme, Ada McGrath (Holly Hunter) contraint sa fille Flora (Anna Paquin) à grandir trop vite et à affronter des problèmes d'adulte. Est-ce le rôle des enfants de venir au secours de leurs parents ?

La Leçon de piano est un film, écrit et réalisé par Jane Campion. Dès le titre, nous voyons l'importance du piano, qui va créer une mélodie d'expression et même une voix. Tenant en compte que Campion montre très souvent des histoires de femmes fortes et leurs difficultés, c'est naturel qu'elle a essayé de reproduire cela avec la protagoniste dans ce film. Avec ce long métrage, la réalisatrice a tenté de présenter un monde plein d'obstacles, mais aussi une femme, Ada, prête à les surmonter. Cependant, je ne trouve pas qu'Ada soit la femme la plus courageuse dans cette histoire, mais plutôt sa fille, Flora.

L'histoire de ce drame historique se déroule en Nouvelle-Zélande dans le XIXème siècle. Nous suivons Ada, une femme écossaise, et sa petite fille née d'un mariage précédent. De ce que nous connaissons, la protagoniste est muette, pas par naissance mais par choix, étant donné qu'elle a volontairement arrêté de parler quand elle avait 7 ans. L'histoire commence vraiment quand la mère et sa fille sont envoyées dans un autre continent parce qu'Ada aura un mariage arrangé par commande de son père, avec un inconnu, Alisdair Stewart. Après son voyage en bateau, la mère et la fille sont laissées sur la plage en attendant le nouveau mari de les chercher. En étant échouée à la plage, la protagoniste enlève la protection de son piano, déterminée à jouer parce que c'est comme cela qu'elle exprime ses émotions. Malheureusement quand le mari arrive l'instrument ne peut pas être déplacé donc il est abandonné à côté de la mer. Désespérée de le récupérer, Ada commence un jeu dangereux avec son voisin, George Baines. Le personnage principal doit prendre des décisions difficiles pour conserver son piano, qu'elle considère comme sa voix, tout en s'engageant dans une romance immorale. Ceci dit, je trouve que même si Ada est perçue comme quelqu'un qui trouve toujours un moyen de lutter contre le monde pour obtenir ce qu'elle veut, je la qualifierais plutôt d'égoïste à cause de la maltraitance qu'elle impose à l'enfant de 9 ans, sa fille.

La fille devient un autre instrument joué par Ada.

La manière donc une femme muette “parle” spirituellement dans ce film est maîtrisé si bien que nous comprenons ce qu'elle sent et pense sans paroles. Par contre, la communication dans sa vie quotidienne se fait en utilisant la langue des signes interprétée par sa fille. Cela implique, à mon avis, une sorte de dépendance de la part de la mère qui empêche également l'enfant de vivre réellement son enfance. Flora doit toujours être à la fois l'intermédiaire et l'adulte et cela semble avoir développé chez elle un sens de protection pour sa mère au lieu de l'inverse. Ainsi, d'une certaine manière, la fille devient un autre instrument joué par Ada. Par exemple, quand un homme essaie de parler avec Ada d'une façon inappropriée au début du film, elle ne peut pas exprimer ce qu'elle veut donc Flora commence à crier les interprétations pour aider sa mère. Le fait que la petite fille doit se comporter comme une adulte nous fait penser qu'elle n'est pas à sa place.

Tout au long du film, nous sommes témoins de la dévotion d'Ada pour son piano mais nous la voyons aussi quand elle tombe amoureuse de Bains, en lui donnant des leçons de piano. Elle commence à jouer une mélodie horrifique, que Flora entend le plus fort. La petite fille est toujours là pour sa mère et elle l'aime sans limites. En voyant Ada, son amour pour sa fille est bien sûr présent, mais son coeur et ses priorités ne sont pas si stables. À cause des activités intimes entre la femme et le voisin devant le piano, pendant le temps des leçons, la fille est laissée dehors seule, sous la pluie. Quand elle demande à sa mère de rentrer, la réponse d'Ada est impolie et elle accuse l'enfant de ne pas bien se comporter. Malheureusement cela n'est pas la seule fois que l'attitude à l'égard de sa propre fille est mauvaise. Dans la seconde partie du film, Ada demande à Flora de livrer un message d'amour, écrit sur une touche du piano, pour son amant derrière le dos de son mari. Malgré les objections de la fille, elle est obligée de le faire parce que sa mère ne va pas la laisser tranquille si elle ne fait pas ce qu'elle veut. L'histoire prend un virage vers la fille qui devient une témoin de la douleur physique et mentale de sa mère.

À la fin du film, Ada, Flora et Bains partent ensemble vers une nouvelle vie. Ils se trouvent sur la même plage qu'au début du film, avec le piano, en prenant un bateau. Lorsqu'ils sont déjà en eau profonde, Ada fait dair à Flora qu'elle veut jeter le piano à la mer. Malgré les objections de Bains, il finit par accepter. Pendant que l'instrument tombe, Ada voit la corde attachée au piano et met consciemment son pied à l'intérieur pour se faire plonger dans l'eau aussi. Cette scène est très symbolique par la représentation d'une réincarnation, pendant un court instant nous avons l'impression qu'Ada va mourir mais elle sort de l'eau en commençant le début de sa nouvelle vie. Cependant, ce moment est une autre preuve de l'irresponsabilité de la mère, parce qu'elle a mis sa vie en danger, ce qui peut être très traumatisant pour sa fille. La relation entre la petite fille et sa mère est marquée par le fait que l'enfant prend le rôle de l'adulte responsable. Dans ce film, comme dans les autres oeuvres de la réalisatrice, la présence d'un personnage féminin fort existe et c'est Flora.

Hristiana Ivanova